lundi 30 novembre 2009

" Un tien vaut mieux...'' Suite et fin.

Chers lecteurs, je me dois de compléter ici l'article que j'ai publié le 17 novembre où je soutenais que des sources historiques importantes montrent qu'il vaut mieux dire " Un tien vaut mieux que deux tu l'auras " , sans "s" au mot "tien", alors qu'une longue suite de dictionnaires et ceux d'aujourd'hui mettent un "s" au mot "tien" et écrivent " Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras ".
Je me dois de compléter parce que d'autres informations se sont ajoutées depuis : une première soutiendra ceux qui tiennent à " Un tiens..." mais d'autres soutiendront les partisans du " Un tien...".
Les défenseurs de "Un tiens..." voient dans le mot "tiens" un impératif pour justifier le "s" final. J'ai trouvé dans mon dictionnaire français-anglais Cotgrave, dans son édition de 1673,un proverbe semblable qui justifie l'impératif ou encore qui sous-entend  "un que vous tenez". Voyez le bas de la photo: "Mieux vaut un tenez que deux vous l'aurez". Pour grossir, cliquez sur la photo; pour revenir cliquez sur votre "retour de page".


Je me devais de vous laisser cette information même si elle ne corrobore pas mon opinion. Ce blogue veut informer correctement ses lecteurs, sans détours, tout simplement. Il faut ajouter ici cependant que le mot "tien" peut être considéré comme un substantif, comme un nom si on veut. Un "tien", c'est ce que tu possèdes. Et en ce sens, on peut sans doute dire " Un tien vaut mieux que deux tu l'auras ". Voyez ce que dit le dictionnaire de l'Académie française dans sa première édition, celle de 1694. Regardez la photo, au centre : "Tien, est aussi substantif, & signifie Le bien qui t'appartient. (...)"




Définition importante. Donc, quand La Fontaine écrit dans sa fable "Le petit Poisson et le Pêcheur" qui a fait école : "Un tien, vaut, ce dit-on, mieux que deux, tu l'auras" ( orthographe de l'édition originale repoduite dans mon premier article ), il donne au mot "tien" le sens de " le bien qui t'appartient ". Comprendre donc : le bien qui t'appartient vaut mieux que deux biens que tu auras.
Après la publication de mon article original, j'ai aussi reçu d'un libraire expert en éditions anciennes ou rares, monsieur Bertrand Hugonnard-Roche (*), que je remercie ici, une photographie d'une autre édition ancienne (**) des Fables de La Fontaine où le mot "tien" n'a pas de "s". Voyez les deux photos, qui font la fable au complet. La phrase proverbiale est à la fin.







Donc, dans cette autre ancienne édition qui s'ajoute à l'originale que j'ai montrée dans mon premier article : pas de "s" à "tien". Ces deux photos, ci-haut, son extraites des Fables choisies de La Fontaine,édition d'Anvers, chez la veuve de Barthelemy Foppens, 1699, pp.195-196. ( Référence complète à (**), en bas ).
Pour finir j'ai trouvé dans le Supplément du Dictionnaire d'Émile Littré (1884) un exemple ancien qui montre qu'il n'y a pas de "s" dans une phrase semblable à la phrase proverbiale. Littré a mis un "s" dans le proverbe qui est dans le corps principal de son dictionnaire mais dans l'exemple historique qu'il ajoute dans son Supplément, il n'y a pas de "s" à tien. Voyez, au bas de la photo.
                                                                                                  



J'ai trouvé, sur internet, une édition de Aye d'Avignon qui donne la même orthographe. C'est moi qui surligne "tien". Pas de coquille donc. Cliquez sur la photo pour l'agrandir; revenez en cliquant sur votre bouton "retour de page".

Donc, dans ce texte du XIIIe siècle, la Chanson de geste Aye d'Avignon, on écrit : "...Qu'assez vaut miex un tien que quatre tu l'auras".
Cette source historique marque la fin de ce trop long exposé. Si on écrit " vaut mieux un tien ( pas de "s") que quatre tu l'auras", comment soutenir qu'il faudrait écrire "un tiens vaut mieux que deux tu l'auras" ? De quatre à deux, rien ne change sur le fond. Et je rappelle que les éditions anciennes des Fables ne mettent pas de "s" non plus, tout comme la première édition du Dictionnaire de l'Académie française, le Dictionnaire de Pierre Richelet ainsi que le Dictionnaire de Trévoux. Merci, cher lecteur, ne m'avoir suivi jusqu'ici. Le prochain article sera plus léger.

(*) Librairie de monsieur Hugonnard-Roche : " L'Amour qui bouquine " au http://www.librairie-amour-qui-bouquine.com/

(**) Autres photos et référence . Note : Le "copyright" des photos de cette édition ancienne des Fables de La Fontaine est détenu par monsieur Hugonnard-Roche qui me les a transmises gracieusement.



Référence complète, fournie par monsieur Hugonnard-Roche:

FABLES CHOISIES. MISES EN VERS PAR MONSIEUR DE LA FONTAINE. Et par lui revues, corrigées et augmentées de nouveau.

PREMIÈRE PARTIE – DEUXIÈME PARTIE – TROISIÈME PARTIE – QUATRIÈME PARTIE.
Suivant la copie imprimé (sic) à Paris, et se vendent A Anvers, veuve Barthelemy Foppens, 1699


Relié à la suite :
FABLES CHOISIES. MISES EN VERS PAR MONSIEUR DE LA FONTAINE. CINQUIEME PARTIE.
La Haye, Henry van Bulderen, 1694.
5 parties reliées en 1 fort volume in-12 (16 x 10,5 cm) de (40)-268-(4) ; (2)-233-(3) et (8)-108-(11) pages.
Reliure plein veau brun, dos à nerfs orné (reliure de l’époque). Accroc en pied du dos (coiffe inférieure partiellement arrachée), petite fente à un mors, coins légèrement usés. Intérieur frais.
NOUVELLE ÉDITION ILLUSTRÉE.
Édition illustrée d’un frontispice et de 235 vignettes gravées par Henri Causse imitées de celles de François Chauveau, avec nombreux culs de lampes et bandeaux gravés sur bois. Contrefaçon rare de l’édition Barbin et Thierry, 1678-1679. Le frontispice est signé Romain de Hooghe, daté 1687 et à l’adresse de Henry van Dunewalt à Anvers. Cette édition qui reproduit l’édition Van Bulderen et Dunewalt de 1688 pour les quatre premières parties (pagination identique). La cinquième partie est ici en première édition contrefaite sur l’édition Barbin, de Paris, faite à la même date (1694). Les estampes à mi-page sont très bien gravées et très bien imprimées, nettes et bien encrées.Références : Rochambeau, 20 (éd. Van Bulderen, 1688).
TRÈS RARE ÉDITION COMPLÈTE DES CINQ PARTIES DES FABLES DE LA FONTAINE, EN RELIURE DE L’ÉPOQUE, ILLUSTRÉES D’APRÈS LES DESSINS DE FRANÇOIS CHAUVEAU.

vendredi 20 novembre 2009

Autographe de VICTOR HUGO.




Autographe de Victor Hugo.

Pour reposer et remercier mes lecteurs d'avoir fait la traversée de mon long article sur " Un tien vaut mieux...", je propose ici, pour le seul plaisir des yeux un envoi de Victor Hugo à Émile de Girardin. Cet autographe est dans un exemplaire de l'édition de 1875 des "Châtiments" que Victor Hugo a offert au publiciste Émile de Girardin, fondateur, en 1836,  du journal politique "La Presse". Le génie de monsieur Émile de Girardin ( 1806-1881 ) a été d'avoir l'audace de vendre son journal à bas prix en tablant sur le tirage et l'augmentation des recettes publicitaires pour compenser les pertes ( Source : " La Grande Encyclopédie ", à Paris, tome dix-huitième sur trente-et-un ). Avec lui, la presse entre dans la modernité. On comprend que Victor Hugo ne perdait pas son temps en soignant Émile de Girardin.
Cet exemplaire est un in-octavo dans une modeste reliure en demi-chagrin noir. Je dis que c'est une reliure "modeste" pour éviter de dire qu'elle est presque laide. On voit que le dos a souffert; le tan du cuir ( ce qui est d'une couleur tirant sur le brun-orange  ) affleure et reste aux mains quand on manipule le volume. Comme toujours, cliquez sur une photo pour l'agrandir; cliquez sur votre "retour de page" pour revenir au blogue.



Bref, un livre qui n'est pas très beau mais il est attachant parce que Victor Hugo l'a tenu dans ses mains. Je vous laisse deux dernières photos. Vous verrez que Hugo n'a pas lésiné sur l'encre. Il écrivait à la plume d'oie. Celle qu'il a utilisée a été taillée large et laissait couler beaucoup d'encre; à tel point que l'encre a traversé la page, dont vous voyez ici le verso :






Revoyez la photo qui coiffe cet article.On sent nettement dans cet envoi de Victor Hugo un élan, une vigueur, une énergie "hugolienne" à l'image de sa personnalité et de son oeuvre. Il mourra dix ans plus tard, à Paris, le 22 mai 1885.

mardi 17 novembre 2009

" Un tiens vaut mieux..." ou " Un tien vaut mieux...'' ? Pas de "s" selon moi.

Il y a un peu plus d'un an, j'avais vu à mon étonnement que Michel David, le chroniqueur politique du quotidien "Le Devoir", avait coiffé sa chronique du jour par le titre " Un tiens vaut mieux" . Une allusion, bien sûr au célèbre proverbe " Un tien(s) vaut mieux que deux tu l'auras ". Le "s" au bout du mot "tien" choquait mon oeil. Sans prendre le temps d'ouvrir le dictionnaire j'envoie immédiatement un courriel à monsieur David, que je connais un peu pour l'avoir souvent croisé pendant mes années de journalisme ou de politique. Sachant qu'il a une bonne plume et qu'il tient au bon français, je lui tiens ce courriel pour lui reprocher amicalement d'avoir fait une faute en ajoutant un "s'' au mot "tien". Je termine mon courriel par un mot d'encouragement : même les meilleurs trébuchent lorsqu'il s'agit de la langue française. La réplique du chroniqueur m'a laissé bouche bée : il m'explique, avec une bienveillante générosité, que le mot "tien'' prend bien un "s". Et il me retourne avec ironie mon encouragement en me disant, à son tour, que même les meilleurs peuvent trébucher. Je saute sur mon Petit Larousse; les pages roses confirment que Michel David a bien raison. Je suis devenu, à ma courte honte, l'arroseur arrosé. Voici un extrait tiré des pages roses du Petit Larousse 2005; il y a bien un "s" qui termine le mot "tien" dans le proverbe. Voyez, au centre de la photo :


Le Petit Larousse ne fait pas exception. Les dictionnaires modernes ou publiés depuis le XIXe siècle mettent un "s" à la fin de "tien''. Voici, par exemple, un extrait de la huitième édition du Dictionnaire de l'Académie française ( 1932-1935 ) :


Voici un dernier exemple, pour ne pas surcharger. Je le prends ici dans le dictionnaire du grand Émile Littré (1883).  Il y a toujours un "s". Le lexicographe cite Jean de La Fontaine, comme la plupart des dictionnaires d'ailleurs:



La cause semble entendue. Les dictionnaires du XIXe siècle, du XXe siècle ou du siècle actuel que j'ai consultés écrivent tous "Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras". Il en va de même pour les éditions de 1740, de 1762 et de 1798 du Dictionnaire de l'Académie française. Je ne sais pas pour la seconde édition, celle de 1718; je ne la possède pas et son tome second n'est pas disponible sur internet.
Attention. Je vais vous surprendre. Consultons le fameux Dictionnaire de Trévoux dans sa dernière et meilleure édition, celle de 1771. Il n'y a pas de "s". On y écrit "...un tien vaut mieux que deux tu l'auras;..." Voyez la photo :



Continuons avec le célèbre dictionnaire de Pierre Richelet, dont la première édition ( 1680 ) a été publiée du vivant du grand La Fontaine. Richelet, comme le dictionnaire de Trévoux, ne met pas de "s" à la fin du mot "tien''. Tiens, tiens, tiens. Voyez au bas de la photo que j'ai prise de mon exemplaire de 1728 :



Je sens que les partisans du "s'' à la fin du "tien'' sont obligés de se tenir aux crins de leur cheval ! Je donne un autre coup en faisant appel au premier et plus célèbre dictionnaire de l'Académie française, celui de 1694. Pas de "s" . Voyez le haut de la photo. ( Comme toujours : cliquez sur les photos si vous voulez les agrandir; cliquez ensuite sur votre "retour de page" pour revenir sur le blogue ).


Je souligne que Jean de La Fontaine, dont la plupart des dictionnaires aiment se réclamer quand ils citent le fameux proverbe, est alors, en 1694, un membre de l'Académie française. Il a été reçu en 1684. Le fabuliste a participé à la rédaction du premier dictionnaire de l'Académie, qui ne met pas de "s" à " Un tien..." je le répète. Je suppose que Jean de La Fontaine aurait fait ajouter un "s" s'il en avait voulu un.  Il mourra le 13 avril 1695.
Pour conclure, allons à la source. On sait que les éditions anciennes ou modernes des Fables du grand La Fontaine, qu'on reproduit dans la plupart des dictionnaires, mettent toujours un "s" au mot "tien". Voici un exemple parmi mille: l'édition de 1769, à Paris, avec les commentaires de M. Coste. La fable, que tous connaissent, et d'où est tiré le fameux passage proverbial, a pour titre " Le petit Poisson & le Pêcheur " . Elle est dans le livre Cinquième. C'est la fable III. Voyez la fin de la fable, au bas de la photo :



On voit que l'éditeur a mis un "s" à "tien". Il justifie son choix en prêtant au mot "tiens" le sens d'un ordre, d'un impératif ( Sa note (1) : " Prens cela, je te le donne ". ) Si on accepte ce point de vue, il faut un "s". Mais la fable a beaucoup moins de force que si on met le possessif  "tien". Si on lui dit "Tiens",en lui montrant un poisson, le pêcheur ne l'a pas encore tout à fait. Si le poisson est "sien", cependant, il le possède vraiment. C'est d'ailleurs en mettant une majuscule au début de "Tien" que des dictionnaires forcent, si je puis dire, l'impératif, et justifient le "s" final. Voyez le grand dictionnaire de Paul Robert dans son édition de 1965 :




Il faut conclure. Je m'en remets à la rare édition originale des Fables, publiée en 1668 chez Claude Barbin.
C'est le document qui est, à ma connaisance, le plus proche de la main, et finalement de la pensée du grand fabuliste car je ne sache pas que le manuscrit des Fables ait survécu. Je ne possède pas ce livre rare, mais je vous montre ici deux photos de l'exemplaire qui est en ligne sur le site "Gallica" de la Bibliothèque Nationale de France. D'abord la page de titre ( photo ici de mon écran d'ordinateur ) :



Et maintenant, voyons la fin de la fable. Il n'y a pas de majuscule à "tien" et il n'y a pas de "s" :


 Le grand fabuliste, maître absolu de la langue française, savait que ce qu'on tient vaut mieux que ce qu'on nous tend. Bref : La Fontaine n'a pas mis de  "s" à tien parce qu'il n'en fallait pas . Les éditeurs ou les correcteurs des Fables qui ont suivi ont cru qu'il fallait un impératif, donc un "s", donc parfois un "T" majuscule à "Tiens" pour justifier le "s" final, ou encore des italiques pour simuler un interlocuteur. En ces matières, je préfère suivre La Fontaine dans l'édition originale de ses Fables ainsi que trois grands dictionnaires: deux de son époque ( Académie de 1694, Richelet ) et plus tard le Trévoux. Je pense qu'on a copié depuis une erreur faite de bonne foi dans une édition ancienne des Fables où on avait cru que le mot "tien" était un impératif substantivé. Tous les dictionnaires sont tombés dans le panneau parce qu'ils croyaient suivre La Fontaine, maître absolu, alors qu'ils suivaient une mauvaise édition de ses Fables, sans doute plus accessible que l'originale.
On lira encore dans les dictionnaires, pendant des siècles sans doute, le fameux "Un tiens vaut mieux que deux tu auras". Et ces dictionnaires, qui montrent plus souvent la voie qu'ils ne nous égarent, je les respecte bien sûr et je les appellerai à mes côtés demain sans doute. Je veux dire en terminant que tous ceux qui écrivent " Un tiens..." ne font pas de faute; on n'en fait pas quand on a le Littré, le Grand Robert et la quasi totalité des dictionnaires de l'Académie à ses côtés. Mais comme j'ai la chance de posséder plusieurs vieux dictionnaires que peu de gens ont à la main j'aime bien partager les vieux mots qui y dorment, comme des papillons épinglés qui s'envolent au vent de notre pensée.
Pardonnez ce long exposé. Vos commentaires seraient appréciés.

dimanche 8 novembre 2009

D'un sein à un saint. ARÉOLE. AURÉOLE.



D'un sein à un saint. ARÉOLE. AURÉOLE.

Il suffit parfois d'ajouter une voyelle, un simple '' u '', pour passer d'un sein (''aréole'')  à un saint ("auréole'').Vous verrez plus bas qu'il a été question un moment de changer '"l'aréole" des seins par "l'auréole" des saints. Et vous verrez aussi que certains dictionnaires faisaient perdre aux hommes l'aréole de leurs seins.  Note : pour toutes les photos du blogue, ci-haut ou plus bas, cliquez sur une photo pour l'agrandir, cliquez ensuite sur votre ''retour de page'' pour revenir sur la page consultée ( pas sur le X de votre ordinateur ).

 Le mot '' aréole '' apparaît dans l'édition de 1718 du dictionnaire de Trévoux selon le '' Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française ''  de Paul Robert ,dans son édition de 1965. Je n'ai pas pas l'édition de 1718 du Trévoux, mais je trouve bien le mot ''aréole '' dans l'édition de 1771 que je possède, la dernière édition du Trévoux. Une '' aréole '', c'est  " le cercle coloré qui environne le mamelon.''  Voici la définition du dictionnaire :

Aréole ( Dictionnaire de Trévoux, 1771)
Nous ferons aussi du Trévoux notre référence pour le mot "auréole''.  L'auréole, c'est la '' Couronne de gloire '', le " cercle de lumière que les Peintres & les Sculpteurs mettent autour de le tête des Saints, des Vierges, des Martyrs, & des Docteurs, pour marque de la victoire qu'ils ont remportée. (...) "  ( Note : il y a aussi ce mot, "nimbe", qui a un sens semblable. J'en parlerai une autre fois. )
Voyez la définition:

Auréole ( Dictionnaire de Trévoux, 1771)
Il a été question, à un moment, d'étendre le sens du mot ''auréole'' pour qu'il couvre aussi le sens de l'aréole des mamelons. Bref, l'auréole qui entoure la tête des saints aurait aussi entouré le mamelon des seins ! C'est dans le '' Nouveau dictionnaire national ou dictionnaire universel de la langue française "  par Bescherelle Aîné ( 1887 ) que je trouve cette information . Voyez au bas de la photo de la définition du mot ''auréole'' ( " Anat. On a proposé de substituer ce mot à celui d'aréole...); la suite sur la seconde photo.

Auréole, début de l'article ( Dict. Bescherelle, 1887)

Auréole, suite ( Dict. Bescherelle, 1887 )
Donc " on a proposé de substituer ce mot ( auréole ) à celui d'aréole, pour désigner ces cercles ou disques colorés et superficiels tel que le cercle coloré qui entoure la base du mamelon, (...)"  Le Bescherelle  n'en dit pas plus sur cette proposition qui n'a visiblement pas été retenue. Les saints gardent leur " auréole '' et les seins gardent leur " aréole '' . Ouf !
Mais attention. S'il n'en tenait qu'à la définition du mot '' aréole '' que je trouve dans le dictionnaire monumental du grand Émile Littré, le mot '' aréole '' ne s'applique qu'au mamelon des femmes. Les seins des hommes ont été oubliés. Pour Littré, l'aréole, c'est, entre autres acceptions, le " cercle coloré qui entoure le mamelon de la femme ''. Voyez la définition. Cliquez sur l'image pour l'agrandir (retour de page pour revenir).

Aréole ( Dictionnaire Littré, 1863)
Pardonnons au grand Littré cette '' erreur ''.  On trouve aussi une définition semblable dans la septième édition du Dictionnaire de l'Académie française ( 1878 )  ( Aréole. s.f. (...) Il se dit principalement Du cercle coloré qui entoure le mamelon de la femme, ... ) :


Aréole ( Dict. de l'Académie française, 1878)
Si on devait se fier à de telles définitions il n'y aurait pas d'aréole autour du mamelon masculin. Le Dictionnaire de l'Académie corrigera dans sa huitième édition ( 1932-1935 ). 
Avant de vous laisser, et pour vous  remercier de m'avoir suivi aussi aussi loin dans cet article, je vous montre ici l'oeuvre dont j'ai retenu un détail en début d'article pour montrer les aréoles de deux mamelons. Cette oeuvre se nomme '' Ave Luna ''  et a été peinte il y a quelques années par le grand artiste Denis Jacques.



Vous aurez remarqué que le modèle est auréolé de la lune; d'où son nom, " Ave Luna '' . Pour joindre l'artiste, monsieur Denis Jacques : denisjacques@videotron.ca 

La belle miniature, en haut de cet article, qui montre des saintes auréolées est tirée du '' Nouveau Larousse Illustré ''  ( tome sixième ) . Le sujet est : " Anne de Bretagne entourée de ses patronnes, miniature des Grandes Heures d'Anne de Bretagne ( commencement du XVIe siècle ).Voici la pleine page :



Merci donc aux artistes d'hier et d'aujourd'hui qui ont illustré cet article, et merci aussi à tous ces lexicographes qui ont défriché pour nous. Ces lexicographes pourraient reprendre le mot du pianiste André Gagnon : " Même mes fausses notes viennent du coeur '' .