mardi 29 octobre 2013

"Chants et prières pour des pilotes" de Jules Roy (1943). "J'aurais aimé partir avant vous et vous laisser légers de moi tandis que me voici lourd de votre pensée..."





Ce sera bientôt le Jour du Souvenir (11 novembre). Pour souligner cette commémoration des soldats qui ont fait le sacrifice de leur vie ou qui ont subi des blessures lors de la Première guerre mondiale ou des autres guerres qui ont suivi, je vous propose un poème de l'écrivain et pilote Jules Roy (1907-2000). Ce poème, dont les premiers mots sont "Mes plus chers amis sont des morts" est en tête d'une plaquette publiée à Alger, en 1943, aux éditions E. Charlot. Le titre de l'ouvrage: "Chants et prières pour des pilotes". Le premier tirage de cet ouvrage a été limité à mille sept cents exemplaires (1700); le mien porte le numéro 502. On compte aussi cent exemplaires réservés à l'auteur et à la presse ainsi que douze exemplaires sur Canson et vingt-quatre sur Vergé Ingres. Voici les deux photos de ce poème qui est très touchant. Pour vous épargner une lecture sur photos, le texte suivra.

Poème "Mes plus chers amis sont des morts" de Jules Roy
Voici le texte:

Mes plus chers amis sont des morts.

Je les retrouve dans la rue
en ceux qui leur ressemblent
et dans ces maisons froides où j'entre en frissonnant.
Leur souvenir m'est un chemin doré sous les halliers d'automne,
une présence à ma solitude.

O mes vieux compagnons des beaux jours d'autrefois,
ô copains avec qui je souriais aux femmes,
ô camarades d'équipage disparus les premiers
quand il restait tant de ciels à contempler
et tant de route à faire ensemble!

J'aurais aimé partir avant vous et vous laisser légers de moi
tandis que me voici lourd de votre pensée
qui n'a pas séché dans mes yeux avec les larmes.
Je vous demeure fidèle comme à celle que j'aimai,
ma première lune d'amour,
dans le jardin de roses de mon unique mois de mai.

Nous parlions le langage secret
des chevaliers d'une autre Quête.
Nous n'étions point jaloux les uns des autres
du même amour qui nous brûlait
et dont l'Accomplissement suprême était la Mort.

Survivant de votre aventure
je vous donne, à la terrasse des bistrots,
des rendez-vous où vous ne venez plus.
Préparez-moi une bonne place où vous êtes:
au chaud l'hiver, au frais l'été.

Il n'est de véritable ami qu'un mort.


Voici la page de titre et la justification du tirage:

"Chants et prières..." Page de titre.
Ayons donc une pensée pour tous ceux qui ont fait le sacrifice de leur vie ou qui ont été blessés lors des dernières guerres.

mercredi 14 août 2013

Je cherche, au Québec, "Le Trésor de la langue française". 16 volumes.

Chers lecteurs, je cherche, au Québec, l'édition complète du "Trésor de la langue française", en 16 volumes, parue de 1971 à 1994 (C.N.R.S./Gallimard). Des libraires français ou américains proposent des exemplaires sur internet mais le prix du transport de ces seize gros volumes est prohibitif. Je ferai une offre intéressante à un libraire, à une institution ou à un amoureux des livres qui me proposera un exemplaire en bel état. Je peux passer prendre les volumes dans toutes les régions sauf dans le Grand Nord québécois! Cela dit, je n'hésiterai pas non plus à faire un petit voyage dans la belle région d'Ottawa! On peut m'écrire à: pierrebouillon1@gmail.com 
Mon compte Twitter est: @PBouillon
Je vous souhaite une belle journée.

mardi 7 mai 2013

Appel à tous. Pouvez-vous identifier ce sceau? A-t-il appartenu au jurisconsulte François Hotman (1524-1589) ?

Sceau. 
Chers lecteurs, je fais appel à vous pour identifier ce sceau qui est dans un de mes anciens dictionnaires. Le  dictionnaire qui porte ce sceau (*) a été imprimé à Paris, en 1539, chez Robert Estienne. Je devine, en haut, un animal, qui ressemble à un chien, debout, deux pattes portées vers l'avant. À gauche, deux lettres, probablement un F et un H. À droite, une lettre, sans doute un V. Dans la moitié inférieure du sceau on voit blason qui a la forme d'une lyre avec en haut un signe en forme de V. Pourriez-vous m'aider?

Ajout du mercredi 8 mai. Une piste!

Une recherche que j'ai faite pour trouver des personnages de renom de la France du XVIe siècle dont le prénom commence par un F et le nom par un H me mène à une hypothèse. Le sceau est peut-être celui de Francois Hotman, célèbre jurisconsulte, né à Paris en 1524 et mort à Bâle en 1589. J'ai vu qu'il a publié, en 1554, chez Robert Estienne justement, un Commentariorum in Orationes Ciceronis. Et, tenez-vous bien, François Hotman a publié, en 1560, un pamphlet, "Épistre envoyée au Tigre de la France", où il dénonçait les excès du cardinal de Lorraine. Ce n'est peut-être pas un chien mais plutôt un "tigre" rétif et encaqué qu'on voit sur le sceau. Si cette piste devait s'avérer, l'exemplaire de cet ancien dictionnaire du XVIe siècle, que je vous présenterai sous peu, aurait donc une provenance exceptionnelle.

Vous pouvez laisser un commentaire ici ou vous pouvez m'écrire directement à : pierrebouillon1@gmail.com

(*) Je présenterai ce dictionnaire dans un prochain article.

mardi 2 avril 2013

Autographe d'Antoine de Saint-Exupéry. 1942.

Envoi autographe d'Antoine de Saint Exupéry. 1942.
Je vous présente aujourd'hui, cher lecteur, un envoi autographe du célèbre aviateur et écrivain Antoine de Saint Exupéry. Ce héros français est né à Lyon, en 1900, et il est disparu, en pleine guerre, lors d'une mission en avion, en 1944. Je ne suis pas spécialiste des autographes de Saint Exupéry mais ils semblent peu communs sur le marché. Cet envoi autographe est sur la page du faux-titre d'un exemplaire de "Pilote de Guerre" (1942, Éditions de la Maison Française, New York). J'ai acheté ce livre, à Québec, d'un ami libraire.

Voici l'exemplaire. Sa reliure est jolie mais modeste.

Exemplaire de ''Pilote de Guerre" (1942) dédicacé par Antoine de Saint Exupéry
Voici maintenant, en plan large, la page du faux-titre qui porte l'envoi autographe (la dédicace si vous préférez) du grand Saint Exupéry. Cliquez sur la photo pour grossir l'image. 

Plan large. Page du faux-titre avec l'envoi autographe de Saint Exupéry.

Voyons, de plus près, l'autographe:

Gros plan de l'envoi autographe de Saint Exupéry
On lit donc:
''Pour madame Gabrielle O. Chassé 
En très amical souvenir
Antoine de Saint Exupéry''

L'écriture de Saint Exupéry, sa signature en particulier, est en pattes de mouche et difficile à lire. Est-ce qu'il a bien tracé, par exemple, un trait d'union entre Saint et Exupéry? Je ne le sais pas. D'un homme si courageux et si volontaire je m'attendais à une écriture puissante, à larges traits. Je ne suis pas graphologue mais je devine dans cette écriture une minutie, une "application attentive" (Le dictionnaire de Paul Robert, 1965, au mot "minutie") qui me surprend chez ce grand aventurier qui a tout bravé pendant sa vie trop brève.

Sur une page de garde de l'exemplaire une personne a écrit, au crayon, en haut de la page: Gabrielle O. Chassé. Et on voit plus bas, toujours au crayon, de ce qui semble être de la même main: 14-4-42. Voici deux photos:



Inscription 14-4-42 et tampon de la Librairie Garneau.

Il est donc permis de croire que Mme Gabrielle O. Chassé a fait signer cet exemplaire, le sien, par Saint Exupéry, le 14 avril 1942. Signé à Québec? Peut-être. J'ai déjà lu que l'aviateur et écrivain était à Québec en mai 1942. Peut-être y était-il en avril. Plusieurs "peut-être" donc. Sur cette page de garde, on voit, en bas, le tampon de la Librairie Garneau, laquelle avait pignon sur rue, à Québec, rue Buade. J'ai fait des recherches, avec le secours d'un ami (merci Guy!) sur cette Gabrielle O. Chassé. Il y a une Gabrielle Chassé, née en 1900, de la famille des Chassé, bien connue à Québec, dont était le journaliste Edmond Chassé (1887-1951), son frère le lieutenant-colonel Henri Chassé, premier commandant du Royal 22e Régiment, et son neveu, le grand journaliste sportif  Louis Chassé, que j'ai connu dans mes jeunes années à Radio-Canada. Mais d'où vient le "O" dans Gabrielle O. Chassé? On est ici en pleine conjecture. Je ne veux pas avancer plus loin dans ce qui n'est peut-être qu'une fausse piste.

En terminant, ayons une pensée pour ce géant de l'aviation et de la littérature, Antoine de Saint Exupéry. Il faut aussi le lire ou le relire.

Dernière heure. Mystère éclairci!

12 avril 2013. Le mystère est éclairci. Une correspondance avec un membre de la famille Chassé me révèle que Mme Gabrielle O. Chassé, ancienne propriétaire du livre et la bénéficiaire de l'hommage de Saint Exupéry, est en fait Mme Gabrielle Ouellet, épouse d'Antoine Chassé et mère du journaliste Louis Chassé. On me dit que la visite de Saint Exupéry avait fait forte impression sur Louis. On l'imagine sans peine.



mardi 26 mars 2013

L'AUBE. C'est avant l'aurore.

L'aube. Photo copyright Pierre Lahoud.
L'aube précède l'aurore. Je veux le montrer, de mon mieux, dans cet article. Les dictionnaires, anciens ou modernes, ne donnent pas toujours des définitions lumineuses... Je lis, dans l'édition de 1718 du Dictionnaire de l'Académie française, que l'aube, c'est "la pointe du jour". C'est vraiment minimal comme définition. Voici la photo. Pour grossir les images, cliquez dessus.

AUBE. Dict. de l'Académie française (1718)
Dans le même dictionnaire, on dit que l'aurore c'est "la lumière qui paraît avant que le Soleil soit sur l'horizon". Ce n'est pas faux, mais on peut dire la même chose de l'aube. Plus bas, on écrit que la "couleur d'aurore" est "une espèce de jaune doré". Voici la photo:

AURORE. Dict. de l'Académie française (1718)

Avançons de trois siècles. Je lis dans Le Petit Larousse 2010: "AUBE n.f. (du lat. alba, blanche). Première lueur du jour à l'horizon. À l'aube, dès l'aube: très tôt. (...)" Et je vois plus loin: "AURORE n.f. (lat. aurora). 1. Lueur qui précède le lever du soleil; moment où le soleil va se lever. Partir à l'aurore. (...)'' On comprend que l'aube c'est "la première lueur" et que l'aurore c'est "la lueur qui précède le lever du soleil". Tout cela est bien vrai, mais peut-on trouver des définitions qui distinguent mieux l'aube et l'aurore? J'ai parcouru de nombreux dictionnaires, d'hier et d'aujourd'hui, et j'ai trouvé deux excellentes définitions dans le CD-ROM du Petit Robert (version 2.1). On lit: ''AUBE n.f. 1080; lat. alba, fém. de albus "blanc". Première lueur du soleil levant qui commence à blanchir l'horizon. Par ext. Moment de cette lueur"(...) Et je lis plus loin: ''AURORE n.f. XIIIe; lat. aurora. Lueur brillante et rosée qui suit l'aube et précède le lever du soleil; moment où le soleil va se lever"(...) J'aime beaucoup ces deux définitions parce qu'on fait bien sentir que l'aube, c'est une lueur qui blanchit l'horizon, tandis que l'aurore est "brillante et rosée" et "suit l'aube". Bravo aux rédacteurs du Petit Robert!

Le grand Victor Hugo avait bien compris la différence entre l'aube et l'aurore. Ce passage, que je tire de l'édition de 1865 des "Misérables", en est une belle illustration: "Donc un matin d'octobre (...) ils étaient sortis, et ils se trouvaient au petit jour près de la barrière du Maine. Ce n'était pas l'aurore, c'était l'aube; minute ravissante et farouche. Quelques constellations çà et là dans l'azur pâle et profond, la terre toute noire, le ciel tout blanc, un frisson dans les brins d'herbe, partout le mystérieux saisissement du crépuscule. (...)"  Hugo y montre bien que l'aube précède l'aurore, qu'on y voit encore les étoiles, que l'azur est pâle et qu'à ce moment le ciel est ''tout blanc''.  Lorsque l'écrivain écrit que l'aube est une ''minute ravissante et farouche" il souligne magistralement que l'aube est un moment, magique, que chassera l'aurore. Tous les amants le savent...Voici l'extrait:

''Les Misérables", Paris, J. Hetzel et A. Lacroix éditeurs, 1865. Page 495.
Frontispice et page de titre de l'édition de 1865 des ''Misérables".


Reliure de mon exemplaire de l'édition de 1865 des ''Misérables".

Lisons maintenant, du même auteur, les lignes impérissables du poème "Demain, dès l'aube..." qu'on trouve dans "Les Contemplations" (1856). Victor Hugo écrit bien que l'aube ''blanchit la campagne". Voici le poème, photographié dans l'édition originale du recueil:



Voici une photo de la page de titre du tome second de l'édition originale des ''Contemplations" (1856) où se trouve ce célèbre poème. J'ajoute, plus bas, une photo de l'exemplaire:

Page de titre du tome II  des ''Contemplations" (1856)

Exemplaire de l'édition originale des ''Contemplations" de Victor Hugo.
Je remercie, en terminant, le grand photographe québécois Pierre Lahoud. Un jour d'hiver, il s'est levé à l'aube et a pris, pour moi, la photo qui coiffe cet article. J'ai donné le titre "aube" à la photo mais je reconnais  qu'on y voit, en bas, les premiers feux de l'aurore.  Le site Web de M. Lahoud est à pierrelahoud.com .  Je vous souhaite, cher lecteur, une belle journée.